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RELIEF

je parle du lieu où la parole est cri – et vrombissement des moteurs et hurlement des freins

Relief

Prix Émile-Nelligan 2012

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Éditions du Noroît

Année : 2011

ISBN Papier : 978-2-89018-725-2

Nombre de pages : 112

*Disponible en version papier seulement

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RÉSUMÉ

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La terre est plate pour les pères qui fatiguent le sol des plateaux à en oublier les gouffres qui les fendent et qu’on appelle coulées. Mais sourd, du fond d’une coulée, la voix des fils abandonnés – parole de colère jaillissant du repli de la terre pour ébranler les fondations de la patrie au-dessus. 

 

Relief convie à cette confrontation, dans une prose poétique séismique, où les habitants du village de l’Ascension, et plus particulièrement Romu, son père fondateur, vacillent sous l’attaque des intempéries et des mots.

EXTRAIT COURT

 

Ici la platitude des plateaux se défait : surfaces de neige gondolées comme des feuilles de tôle – sillons et saillies balafrant les flancs et les faces de la géographie – gouffres béants plongeant entre les montagnes. Et le gémissement des arbres gelés – et le froissement de la neige tôlée : aux yeux et aux oreilles Romu, le relief.

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EXTRAIT LONG

 

Dans la vision du déplacement, le décor s’organise en cercles concentriques : au premier plan, les troncs bougent vite, contournant de près la camionnette ; au second plan, les arbres passent à vitesse moyenne, comme des marcheurs; à l’arrière-plan enfin, le dense de la forêt tourne très lentement – à la vitesse de la terre. Au hasard de la rotation, la roue du décor produit des radiales d’arbres parfaitement alignés. 

Enfin la roue du décor s’immobilise : les radiales se fixent au milieu d’un renfoncement. Les carreaux rouge orange de la veste se camouflent dans les couleurs d’automne; la tronçonneuse orange et la jerrycan rouge en tombant se fondent dans le tapis de feuilles; le crochet et la hache gisent par terre comme des restes d’ébranchage. 

Le vent se lève – et les yeux Romu, sur les feuillages qui brassent mille tons de rouge et de jaune : le rouge sucré de l’érable rouge, le jaune verdâtre du peuplier, le jaune blanchâtre du bouleau, l’orange brûlé de l’érable noir – tremblements fous des feuillus troublant la solidité des conifères teintés de vert et de noir. 

La lumière jaunâtre du jour filtre à travers le dais des feuillages. Il pleut de grosses feuilles d’érables humides qui vous collent au corps – et au capot et aux vitres de la camionnette. 

Silhouette fondue dans le décor d’automne, Romu – sur le plan vertical des troncs nus, entre tapis et feuillages. 

Essence versée, chaîne aiguisée. Cette démarche du bûcheron à travers bois : pied de cheval, œil d’oiseau : les bottes enfoncées dans les feuilles jusqu’aux chevilles; la tête perdue dans les hauteurs. Crochet à l’épaule, toujours. Scie en main, tenue par l’anse au-dessus, lame derrière. Cette façon aussi de poser la main sur un arbre qu’on va abattre, de remonter le tronc du regard jusqu’au feuillage. Cette lenteur de la décision. Cette évaluation sûre du terrain d’abattage. Cette prévisualisation de la chute, comme si chutait déjà : de ce côté, dans l’éclaircie entre les bouleaux, une trentaine de pieds. Et le marquage invisible de la ligne de coupe sur le pourtour du tronc. Le cordon de démarrage tiré, le bruit mécanique saisit les arbres. Les révolutions du moteur aussitôt diminuent. Le bruit un temps étouffé : la tronçonneuse hoquette dans les feuilles mortes. La chaîne tranchante tourne par à-coups. L’outil dégage une fumée bleutée qui tranche avec les couleurs de l’automne. 

La tronçonneuse maintenant tenue en main – comme un chien mauvais tenu en laisse. Devant, un grand bouleau jaune : écorce cuivrée, refrisée; ramure ovale, solide. L’essence afflue dans les cylindres. Les pistons s’affolent sous le coup des explosions. Le bruit transperce les arbres et les nuages. La fumée se propage dans les ramages du bouleau – colore le feuillage en jaune bleu. 

Le décor brûle des couleurs chaudes et froides des feux de forêt : et le rouge et le jaune du feu, et le bleu et le blanc de la fumée. Les flammes caressent les troncs et les branches; les feuillus sont des bouquets de flammes; les conifères sont des torches allumées. Le son des épines qui crépitent; le bruit des cônes qui explosent. Et soudain le fracas d’un arbre qui tombe – de tout son long sur les feuilles mortes. La braise qui couve sous le tapis; le sol qui chauffe du dedans; l’humus en feu contenu, fumant : l’écorce même de la terre en douce, brûlant. â€‹

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PRESSE ET ÉCHOS

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